Plus le bruit est fort plus les dégâts sont probables – ce que dit une méta-analyse sur la surdité professionnelle

La surdité professionnelle causée par le bruit (NIHL, pour Noise-Induced Hearing Loss) est l’une des maladies professionnelles les plus fréquentes. Pourtant, elle reste souvent négligée, notamment dans l’industrie manufacturière. Une méta-analyse récente, menée sur 10 études dans 9 pays (dont la Chine, l’Éthiopie, la Jordanie, la Malaisie et l’Iran), vient confirmer un lien clair entre exposition au bruit ≥85 dB(A) et survenue de pertes auditives chez les salariés. Plus le bruit est fort plus les dégâts sont probables.

Surdité professionnelle

Méthodologie

Cette revue systématique repose sur l’analyse de 10 études transversales publiées entre 2003 et 2022, représentant un total de 5 910 travailleurs du secteur manufacturier.
Les critères étaient les suivants :

  • Population : travailleurs du secteur manufacturier,
  • Intervention : exposition au bruit ≥85 dB(A),
  • Comparaison : exposition <85 dB(A),
  • Résultat : survenue de NIHL (perte auditive liée au bruit).

Résultats clés

  • Les travailleurs exposés à ≥85 dB(A) ont un risque 1,90 fois plus élevé de développer une NIHL que ceux exposés à moins de 85 dB(A).
  • L’analyse de l’hétérogénéité montre une variabilité modérée, liée à des différences de méthodologie et de contexte entre les études.
  • La majorité des pertes auditives observées concernent les hautes fréquences (4–6 kHz), caractéristiques de la NIHL.
  • Une proportion importante de jeunes travailleurs (<35 ans) présente déjà des pertes auditives significatives, notamment dans les secteurs à forte exposition.

Discussion et implications pour les entreprises pour limiter les cas de surdité professionnelle

  • Le seuil de 85 dB n’est pas anodin. Même à ce niveau, et sans exposition prolongée, le risque de perte auditive augmente nettement.
  • Le port de protecteurs auditifs est encore insuffisant : certaines études mentionnent qu’une majorité de travailleurs exposés ne les utilisent pas systématiquement, notamment en raison d’un inconfort ou d’un manque de sensibilisation.
  • La prévention doit être renforcée : formations, contrôles de port effectif, ergonomie des protecteurs, et mesures techniques de réduction du bruit sont à privilégier.
  • La NIHL est insidieuse : les salariés ne perçoivent pas immédiatement leur perte auditive, ce qui explique leur faible recours aux dispositifs de protection.

Conclusion

Cette méta-analyse vient confirmer, à l’échelle internationale, un constat désormais incontournable : le bruit industriel nuit à l’audition même en dessous des seuils considérés comme “légaux”. Le risque de surdité professionnelle augmente significativement dès 85 dB(A) (rappelons qu’en Europe la mise à disposition intervient dès 80dB(A) sur 8h et que le port devient obligatoire dès 85dB(A) sur 8h), ce qui doit inciter les entreprises à réévaluer leurs stratégies de prévention du risque bruit.

Source

Aqsyari R., Sumardiyono, Murti B. (2022). Meta-Analysis the Effect of Excessively Loud Sounds on Noise Induced Hearing Loss in Manufacturing Industry Workers. Journal of Epidemiology and Public Health, 08(02), 275–283.